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Bavo Verwimp — Un contexte économique pour l'agroécologie

Lisez infra l'essentiel de son exposé.
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Brève présentation de notre entreprise
De Kijfelaar est une exploitation mixte localisée en Campine. Il y a 5 ans de cela, nous sommes passés d'une simple laiterie comptant quelque 90 têtes de bétail à une exploitation mixte. Et même si nous continuons à investir dans l'élevage, nous le faisons dans une tout autre proportion. Nous misons dorénavant surtout sur la production végétale et nous nous efforçons d'écouler notre production directement auprès de nos clients proches.

En optant pour une exploitation mixte, notre ferme est devenue agroécologique – nous parlons d'une ferme bio –, mais nos pratiques s'inscrivent totalement dans ce concept. Nous nous faisons certifier, ce qui constitue une valeur ajoutée pour notre clientèle. Nous privilégions le moins d'intrants externes possible (hormis des effluents d'élevage supplémentaires et de la chaux).

Pour sa part, le bétail occupe une place spécifique. Nous avons réduit son nombre de deux tiers (30 ha). Nous le nourrissons avec les graminées/trèfle provenant des champs en jachère, mais aussi avec des déchets verts, par exemple des pommes de terre impropres à la consommation pour les hommes. Nos bêtes occupent donc leur place spécifique en bouclant la boucle (elles nous donnent par ailleurs de l'engrais de bonne qualité).

Après 5 ans de fonctionnement, nous constatons que notre production est bonne. Les aspects techniques de cette transition ont également été bien intégrés. Cela ne s'est certes pas fait sans mal, mais cela tourne. Nous proposons de bons et délicieux produits. Force m'est dès lors de constater qu'il est parfaitement possible de pratiquer une agriculture agroécologique. Et ce ne sont, en effet, pas les techniques agricoles qui manquent pour pratiquer un autre type d'agriculture.

Pourquoi n'y a-t-il pas plus d'exploitations agricoles qui franchissent le pas de l'agroécologie ?
Cela est dû, selon moi, à l'aspect agroéconomique. Fondé sur l'agriculture traditionnelle, le modèle actuellement utilisé ne fonctionne pas pour les agriculteurs bio. Nos produits peuvent eux aussi souffrir d'une rentabilité insuffisante.
Voyons cela plus en détail.

Les problèmes ne sont pas particulièrement différents de ceux connus par les agriculteurs traditionnels.
1. Écoservices
Nous ne produisons pas seulement des « commodities » (produits alimentaires), mais nous fournissons aussi des écoservices. Et même si l'Europe les a intégrés dans les mesures agroécologiques, ils n'en demeurent pas moins d'un coût très élevé. Cette démarche ne s'inscrit notamment pas dans le modèle économique.

2. Offre et demande
Le gros problème, c'est que le prix payé pour nos produits est de plus en plus éloigné de celui que nous payons pour nos intrants. En d'autres termes, notre production nous coûte énormément. En tant qu'agriculteurs bio, nous avons relativement peu de frais d'intrant, toutefois, le prix de vente peu élevé a également une incidence sur nous. C'est là un problème qui dépasse de loin l'agriculture.

Cela reste un problème classique, mais il est extrêmement difficile de concilier l'offre et la demande. Ainsi, cette année, nous avions deux fois plus de paille que l'an dernier. Notre capacité de stockage est suffisante et nous pouvons facilement l'entreposer. Et pourtant, quand on voit les différences de récolte sur la même superficie et en appliquant les mêmes techniques, il en résulte que l'agriculteur est souvent mis sur la touche et qu'il doit se contenter du prix le plus bas.
Vous pouvez aussi, par exemple, réagir très lentement à la demande. Si les consommateurs veulent une certaine variété de poires, cela prend facilement 5 ans avant que vous ayez, en tant qu'agriculteur, effectué la transition en ayant une production suffisamment importante et de bonne qualité. Vous arrivez trop tard pour le marché.

3. L'aspect de la disponibilité de l'information. Les acteurs du marché devraient pouvoir tous disposer des mêmes informations au même moment, mais cela ne marche pas. Les agriculteurs n'en savent pas autant que les acheteurs.

4. Homo economicus
Un agriculteur n'est pas toujours un homo economicus. Il a généralement d'autres perspectives ou motivations. Ainsi, la survie de sa ferme revêt souvent plus d'importance que les rentrées à court terme. Il pense aux générations futures. Du coup, celui qui devrait s'arrêter continue à travailler et à produire. Ce qui génère une partie de l'offre pour laquelle il n'y a peut-être pas de demande. Le modèle théorique ne fonctionne donc pas.

En tant qu'agriculteur bio, nous suivons de surcroît les prix pratiqués dans les supermarchés (qui comptent déjà beaucoup d’articles bios). Ne vous méprenez pas : les agriculteurs bio sont eux aussi mis sous pression afin qu'ils approvisionnent les grandes chaînes aux meilleurs prix. Et même si le bio répond toujours à une demande du marché et qu'il y a pénurie, nous sommes soumis nous aussi aux mêmes mécanismes que ceux de l'agriculture traditionnelle.
Ce que j'aimerais, c'est faire quelque chose pour remédier à cela. Il existe diverses formes de marché et différentes façons d'organiser votre économie.

Micro-macro
Pour l'heure, de nombreux agriculteurs bio recherchent des solutions au niveau micro. Vente directe, systèmes CSA (community supported agriculture), diversification, comme commerce équitable, écotourisme, etc.
Et même au niveau des petites filières, la pression sur les prix reste de mise – la majorité des clients compare les prix et ils ne sont que peu nombreux à payer simplement le prix.

Il est nécessaire de travailler ici au niveau macro
Nous avons réalisé cet exercice dans l'ONG Wervel, qui œuvre en faveur d'une agriculture juste. Si l'on veut donner à l'agriculture agroécologique un cadre de référence dans lequel peut voir le jour un modèle agricole macroéconomique, et viable à long terme, le concept de l'économie écologique offre un énorme potentiel. Sa spécificité, c'est qu'elle se fonde sur un environnement physique limité. Ce modèle n'offre donc pas de croissance illimitée. Vous devez et pouvez travailler avec efficacité, mais le système a ses limites.

Le concept d'économie écologique se compose de trois étapes (suivant un ordre différent de celui de l'économie classique).
Vous déterminez en premier lieu l'échelle. Que pouvons-nous produire sur nos terres limitées et avec notre capacité écologique limitée ?
Recherche des instruments adéquats nous permettant de maîtriser notre production.
Étape deux : partage du « gâteau » entre les pays, les régions et les agriculteurs eux-mêmes
Étape trois : Comment pouvons-nous utiliser au mieux la superficie restreinte de terres et l'intrant limité ?
Nous ne pouvons pas y arriver au niveau de l'agriculteur ; il nous faut bénéficier de l'aide des pouvoirs publics. Et, à cet égard, nous ne leur demandons pas de nous soutenir financièrement, mais de nous faciliter la tâche.

BIOGRAPHIE
Au terme de sa formation classique d'ingénieur agronome (KULeuven), Bavo Verwimp a poursuivi des études en agroéconomie à l'UCL. Après plusieurs découvertes de divers modèles agricoles dans d'autres pays (au Chili, notamment), Bavo Verwimp a retrouvé ses racines campinoises.
Il est actif sur différents fronts. Il occupe ainsi un emploi à mi-temps d'économiste spécialisé en agriculture, dans le cadre duquel il collabore à des analyses d'impact économique, par exemple, de projets nature. Il travaille en outre dans sa ferme bio De Kijfelaar, une exploitation mixte (production de viande, cultures et horticulture) presque exclusivement axée sur la vente directe. Outre la production pure et dure, l'exploitation compte par ailleurs énormément de terres réservées à une gestion agricole respectueuse de l'environnement.
Le reste du temps, Bavo Verwimp est volontaire dans plusieurs organisations comme Wervel, pour laquelle il vient récemment encore de rédiger un article consacré à l'agriculture et à l'économie écologique.

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